VinMaské : acheter du vin en le dégustant à l’aveugle

La winetech est particulièrement dynamique ces dernières années, avec par exemple de nombreux outils pour servir le vin (l’aérer, le mettre à température, le conserver plus longtemps une fois la bouteille) ou de nouvelles façons de le commercialiser en touchant de nouveaux consommateurs.

J’ai eu connaissance il y a quelques temps d’une nouvelle société qui m’a intrigué car elle propose au client d’acheter son vin complètement à l’aveugle !

Si je suis toujours le premier à aimer découvrir de nouvelles appellations, de nouveaux vignerons, j’ai dans mon comportement d’achat un biais énorme vers les vins de Bourgogne et de Champagne qui composent peut être 80/85% de ma cave à vin. Cela relève d’une réelle affinité avec ces régions que je connais très bien ou encore d’une facilité d’approvisionnement. Le consommateur lambda quant à lui est aussi influencé dans son comportement d’achat : au supermarché, il va se fier au nom de l’appellation ou peut-être même au design de l’étiquette. De nombreux éléments rentrent en considération mais le grand absent est pourtant le plus important : le vin en lui même (sauf bien sûr si il choisit un vin qu’il a déjà gouté).

La proposition de valeur qui consiste à dire: « vous allez choisir le vin que vous allez acheter à partir d’une dégustation à l’aveugle de 3 vins » est donc particulièrement intéressante et j’ai pu tester ce concept.

VinMaské

 

Le concept VinMaské a été créé par Julien – ingénieur de formation et titulaire du WSET niveau 2 – épaulé par Alexandra – titulaire du WSET niveau 3 et d’un MBA en marketing et commerce international – qui déguste depuis plus de 20 ans et a noué de belles relations avec des vignerons talentueux.

VinMaské propose plusieurs offres selon un système de box avec un abonnement sans engagement. Vous pouvez choisir de déguster seul ou à deux, d’acheter seulement le coffret dégustation ou de recevoir également votre bouteille de vin préférée à l’issue de l’expérience.

Test

 

J’ai donc reçu un coffret contenant 3 échantillons ainsi que les recommandations d’usage. Julien m’a expliqué que les échantillons sont préparés par une société qui possède une technologie brevetée permettant de garantir la stabilité des caractéristiques organoleptiques du vin pendant au moins 3 mois.

La préparation est plutôt simple :

  • Mettre les échantillons au réfrigérateur pendant 5/6min.
  • Préparer 3 verres.
  • Vous installer dans un environnement neutre (en ayant pris soin de « neutraliser » votre palais) .
  • Servir les échantillons dans les verres et laisser les vins s’aérer une dizaine de minutes.

Commence alors une expérience assez singulière puisqu’il est finalement assez rare de déguster complètement à l’aveugle : quand on sert le vin avec une chaussette, n’a-t-on pas déjà un indice grâce à la forme de la bouteille ?

Il y a deux façons de concevoir la dégustation de ces vins :

  • J’aime / j’aime pas : ne pas trop réfléchir, déguster les 3 vins successivement et choisir tout simplement celui qui nous plait le plus. Désintellectualiser / démystifier le vin.
  • En faire un réel jeu de dégustation à l’aveugle, essayer de déterminer les marqueurs de cépage, les méthodes de vinification, etc.

J’ai choisi le deuxième angle car bien que je sois un piètre dégustateur à l’aveugle, j’avais tout de même envie de me tester !

L’oeil

 

Vin A
Vin B
Vin C

Commençons par l’aspect visuel, le vin A a un disque brillant et une robe d’un rouge rubis mais assez peu pigmenté. Le Vin B a un disque légèrement moins brillant et une robe plus foncée. Le vin C est beaucoup plus pigmenté.

Nez

 

Au nez, le vin A est un peu fermé, les arômes sont légers, on est sur la pureté du fruit (fraise des bois). Le nez du vin B est plus ouvert, un peu plus puissant et complexe, avec des arômes de fruits noirs, de musc (léger). Le nez du vin C est le plus puissant des 3, le vin me semble être jeune mais exhale déjà des notes de sous-bois, presque terreuses (comme si je mettais le nez dans un vieux thé Pu-erh).

Bouche

 

En bouche, le vin A est très fluide, digeste, l’aromatique est simple mais agréable, on a un bel équilibre au niveau de l’acidité et une belle persistance très légèrement mentholée avec une touche saline. Pas de tannin.

Le vin B est également fluide avec beaucoup de présence en milieu de bouche, arômes de fruits noirs et de violette en rétro-olfaction. Peu de tannins et déjà bien intégrés, j’imagine qu’il n’y a pas (ou très peu) de bois neuf dans la vinification. Je retrouve en fin de bouche une certaine minéralité et mon palais garde un certain temps la trace du vin.

Le vin C a une matière plus dense qui vient tapisser le palais, on a plus de tannins mais rien d’astringent. Belle finale plus fraiche que ce que j’aurais imaginé au nez (on sentirait presque un soupçon d’eucalyptus lorsque le vin s’estompe).

Verdict

 

Faire des propositions d’appellations est plus difficile que ce que j’imaginais, j’ai tendance à penser que le premier vin, par ses arômes légers, sur la pureté du fruit pourrait venir de la Loire (Sancerre, Saumur-Champigny) sur le millésime 2016 (précision et fraicheur).

Pour le second vin, ce n’est pas sans doute mais j’imagine un Bourgogne, peut-être un Hautes Côtes de Nuits, sur un millésime un peu plus évolué, 2014 étant un bon candidat.

Pour le 3ème, il ne ressemble à rien de ce que j’ai pu déguster, peut-être est-ce un vin étranger ? J’écarterais l’Italie et irais dans un pays plus chaud même si il n’y a pas la sensation alcooleuse que l’on peut avoir sur certains vins chiliens par exemple.

Ce qui est intéressant, c’est que ces vins pourraient tout à fait être des Vins de France élaborés par de bons vignerons et auxquels je n’aurais peut-être pas accordé un seul regard dans d’autres circonstances !

Ce sont en tout cas 3 jolis vins, j’ai pris du plaisir à déguster chacun des 3 et j’ai finalement choisi le vin n°2 (surprise!).

Je n’ai plus qu’à flasher le code présent sur le document qui était joint aux échantillons et à choisir mon vin pour recevoir la bouteille à la fin du mois !


Je mettrai à jour l’article lorsque les vins de Février auront été dévoilés. Vous saurez alors si je suis un génie de la dégustation ou si je suis comme annoncé un bien piètre dégustateur à l’aveugle !

L’expérience est ludique et remet en cause les certitudes, la manière de concevoir l’approche du vin et de son achat, je recommande chaudement ce concept !


EDIT : Julien a arrêté l’aventure, Vin Maské n’existe plus, l’entrepreneuriat  dans le vin comme dans les autres domaines est malheureusement souvent synonyme d’échec.


2 comments on “VinMaské : acheter du vin en le dégustant à l’aveugle

  1. Exactement ce qu’il me faut pour moi aussi m’exercer à la dégustation à l’aveugle.
    Le seul hic c’est de devoir attendre les résultats et que tu ne puisses pas goûter à nouveau les trois vins après avoir connaissance de leur origine.
    Merci pour ton avis 🙂

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