Les Hospices de Beaune et le Domaine de Chambord s’associent pour les soignants

Quel est le lien entre le château de Chambord et les Hospices de Beaune ? Ces deux lieux patrimoniaux illustres se sont unis pour rendre hommage aux soignants en créant une pièce des Présidents unique dans l’histoire des Hospices de Beaune qui sera vendue au profit de la fondation des hospitaliers de France lors de la 160ème Vente des vins des Hospices de Beaune le 15 novembre prochain. Et ce lien, c’est Antoine de Thoury, président de la tonnellerie Cadus installée à Ladoix-Serrigny qui l’a fait, puisque sa société bourguignonne élabore depuis 2018 des fûts à partir des chênes du domaine de Chambord.

Jean D’Haussonville (Directeur du domaine national de Chambord), Antoine de Thoury (président de la tonnellerie Cadus), François Poher (Directeur des Hospices Civils de Beaune) et Ludivine Griveau (régisseuse du domaine des Hospices de Beaune) dans la salle des Illustres du Château de Chambord le jeudi 1er octobre pour célébrer le partenariat entre les deux établissements.
(c) Domaine national de Chambord – Olivier Marchant

La tonnellerie à Chambord

Le domaine de Chambord est le plus grand parc forestier clos de murs d’Europe, sa superficie approche les 5 500 hectares. A l’inverse de la forêt voisine de Boulogne qui est gérée de manière à donner du bois, la forêt de Chamborda été aménagée avant tout pour accueillir une activité cynégétique de renommée internationale. On y trouve 40% de résineux et 60% de feuillus, dont deux espèces de chênes : des chênes sessiles et des chênes pédoncule.

(c) Domaine national de Chambord – Olivier Marchant.JPG

Jean d’Haussonville a souhaité développer une activité de tonnellerie. Pour cela, il a pu s’appuyer sur l’office national des forêts (ONF) qui est spécialisé dans la gestion durable des forêts et sélectionne les arbres à abattre, et il s’est associé avec la merranderie Cizeau, installée autrefois à Bracieux, aux portes de Chambord et dont l’entreprise est aujourd’hui implantée au sein l’Ecoparc d’affaires de Sologne à Neung-sur-Beuvron, et avec la tonnellerie Cadus installée à Ladoix-Serrigny en Bourgogne.

Dans le domaine de Chambord, seuls 10% des chênes ont la qualité nécessaire pour être utilisés dans le cadre de la production de fûts. Il faut imaginer que 55m3 de chêne sont nécessaires pour obtenir 10m3 de merrains. On utilise uniquement des morceaux droit de fil avec 0 défaut. La découpe génère également beaucoup de perte, les morceaux sont utilisés à d’autres fins.

Les parties rouges sont de la perte

100 fûts de chênes estampillés Chambord sont élaborés chaque année, il s’agit donc d’une production aussi infime qu’elle est prestigieuse !

Le vignoble de Chambord

Cette activité de tonnellerie a accompagné la renaissance du vignoble de Chambord. Il y a 400 ans, on comptait pas moins de 400 fermes au sein du domaine et chaque fermier possédait son petit vignoble, il y a donc toujours eu de la vigne à Chambord, des plans du 18ème en attestent.

En 2015, le domaine s’est associé avec Henry Marionnet pour commencer la replantation du vignoble avec un jardin conservatoire comportant des sélections massales de 3 cépages historiques. L’histoire la plus intéressante concerne le romorantin : La maison Marionnet a acquis en 1999 une parcelle de 2ha sur laquelle se trouvaient des pieds de romorantin non-greffés pré-phylloxériques plantés avant 1850. Or le romorantin est un cépage historique dont il se dit que François I en aurait acquis 80.000 pieds en 1518 (en provenance – tenez-vous bien – de Bourgogne, la boucle est bouclée !). Pinot noir, sauvignon, orbois et gamay ont également été plantés pour une surface totale de 14ha à moins de 2km du château.

Le domaine n’a pas pu apposer le nom de Chambord sur l’étiquette de la bouteille pour le premier millésime (car seuls les vins en AOC peuvent utiliser le nom d’un château) mais depuis le millésime 2019, le domaine a été inclus dans l’AOC Cheverny et le vin rouge peut fièrement revendiquer le nom de Chambord. À terme, le vin blanc du domaine sera lui en AOC Cour-Cheverny (et peut-être un jour en AOC Chambord). Les vins sont élaborés par le domaine Henry Marionnet et sont certifiés bio.

Un nouveau chai dessiné par Jean-Michel Wilmotte devrait voir le jour prochainement et le domaine souhaite développer une offre oenotouristique pour tirer profit de sa proximité avec la Loire à vélo et le château dont il est proche mais pas à proximité immédiate.

Dégustation

Mais alors ces vins, que valent-ils ?



Vin blanc
Le nez est envoûtant, sur des notes d’abricot mûr, de datte. En bouche, il y a de la matière, on sent la présence de glycérol, les arômes reviennent en force en milieu et fin de bouche. L’acidité est très jolie, avec une pointe de salinité en fin de bouche et une belle persistance aromatique. Ludivine Griveau explique qu’elle n’aurait pas peur de faire passer ce vin dans le bois.
💶 30€ (70€ en magnum)



Vin rouge
Le vin rouge m’a moins convaincu mais les vignes sont encore très jeunes. On trouve au nez des notes de fruits rouges et noir, un peu de réduction mais qui s’estompe vite. En bouche, l’acidité est un peu trop forte et c’est un peu brouillon, malgré un toucher de bouche agréable.
💶 19€ (47€ en magnum)

La forme de la bouteille n’est pas un hasard, c’est une réplique d’une bouteille du maréchal de Saxe trouvée dans le latrines du château lors de fouilles, l’attention portée aux détails, une fois encore !


Commentaires de dégustations, conseils, Ludivine Griveau a eu un échange nourri avec l’équipe du jeune domaine !

La Pièce des Présidents de la 160ème vente des vins des Hospices de Beaune

Venons-en à la star de la 160ème vente des vins des Hospices de Beaune, la Pièce des Présidents qui a donc été vinifiée cette année dans un fût de chêne de la forêt de Chambord.

Si le produit de la vente des vins des Hospices de Beaune revient à l’hôpital de Beaune, la Pièce des Présidents est toujours vendue au profit d’associations caritatives et des personnalités sont invitées à animer la vente pour faire monter les enchères. Cette année, François Poher et Ludivine Griveau n’ont pas hésité bien longtemps : il fallait remercier les soignants qui ont été si présents pendant la première vague de la crise du covid-19 au printemps.

« On a eu l’occasion même aux vignes de se rendre compte d’à quel point ils ont oeuvré et ont été en première ligne et donc quoi de plus naturel qu’à notre tour, on déploie notre passion, notre amour pour la vigne et le vin pour leur cause » explique Ludivine Griveau.

Il fallait donc que cette pièce soit unique et cela a commencé à la vigne. Accompagnée de M. Poher, Ludivine Griveau est allée dans les vignes, arpentant toutes les parcelles du domaine pour sélectionner des zones, des pieds et très vite, leur choix s’est porté sur le Grand Cru Clos de la Roche situé en Côtes de Nuits. Le domaine y possède côte à côte dans le sous-climat les Froichots une vieille et une jeune vigne. Spontanément, ils sont allés du côté de la vieille vigne (plantée entre 1968 et 1972) où la plupart du temps, les fruits sont très beaux. L’idée leur est venue d’aller plus loin, de se payer le luxe de sélectionner aussi les pieds sur lesquels ils prendraient les raisins pour élaborer ce vin unique. Au moment de la récolte qui a eu lieu le 25 août, on a donc mis de côté une palette dédiée avec les raisins issus des pieds sélectionnés au préalable conjointement avec le tâcheron qui a en charge la conduite de la vigne dans cette parcelle. Le reste de la parcelle a évidemment été vendangé et les raisins ont été assemblés dans la cuvée de Clos de la Roche classique.

Comme ça ne suffisait pas, ce caractère unique a été poussé jusqu’au choix de faire fermenter le raisin et de vinifier dans le fût même dans lequel le vin allait être élevé par la suite. Ludivine Griveau a souhaité être présente au moment de la chauffe, au moment de la mise en rose des merrains, au moment de la composition du fût, au moment de la sélection des fonds (et a participé au choix très pointilleux des bois). Les raisins ont été placés directement dans le fût mis à la vertical, en vendange entière à 100% (ce qui diffère de l’itinéraire technique habituel du domaine) pour la fermentation alcoolique. Le fût a ensuite été descendu en cave, on a posé un couvercle en chêne dessus. Il n’a été travaillé que par les mains de Ludivine Griveau, avec des pigeages – où plutôt des caresses comme le précise Ludivine -. Au bout de deux semaines, le vin et le marc ont été retirés, le fût est retourné à la tonnellerie pour être refermé et que le fond soit scellé, puis le vin a été entonné dans ce même fût qui reposera dans les caves des Hospices de Beaune jusqu’à la vente !

© https://hospices-beaune.com/

Dernier élément exceptionnel et pas des moindres, l’acheteur pourra s’il le souhaite faire élever le vin au sein des caves des Hospices de Beaune sous le regard expert de Ludivine Griveau.

La Pièce des Présidents a tout pour battre des records au profits des soignants (au travers de la Fédération Hospitalière de France et du Comité de Gestion des Oeuvres Hospitalières) ! Rendez-vous le samedi 15 novembre pour connaitre le résultat de la vente !

Dégustation des vins du Domaine des Hospices de Beaune

Avant de pouvoir déguster les vins du millésime 2020 au mois de novembre, il fallait évidemment revisiter quelques millésimes de la dernière décennie.



Du côté des blancs, un Meursault cuvée Loppin 2017 ample, puissant avec le gras unique d’un vin de Meursault mais une très belle tension et un Corton Blanc Grand Cru Cuvée Docteur Peste 2015 avec des notes beurrées, une grande élégance et une longueur tout en subtilité.

Puis quelques rouges, un extraordinaire Volnay Santenots 1er cru cuvée Jehan de Massol 2016 avec son éclat de fruit, sa finesse de grain, une caresse en bouche avec une élégance extrême, un Corton Grand Cru Cuvée Charlotte Dumay 2013 avec des notes de fruits confits, de cuir, une texture soyeuse, très fluide et une structure indéniable mais aux angles arrondis. Puis l’emblématique Beaune 1er Cru cuvée Dames Hospitalières 2015, plus massif, avec une structure tannique encore imposante mais qui se patinera merveilleusement avec l’âge. Et impossible de poser son verre avant d’avoir goûté le Santenay cuvée Christine Friedberg 2015, un vin juteux, sur des notes de fruits rouges et un élevage très discret. Las, plus le temps de goûter le Savigny-les-Beaune 1er cru cuvée Arthur Girard 2015 !

Sans bouger de la salle des Chasses du Château de Chambord, c’est un beau voyage à travers les climats de Bourgogne que nous ont offert François Poher et Ludivine Griveau, ainsi qu’un hommage aux donateurs qui au fil des siècles ont contribué à créer le patrimoine viticole de 60 hectares des Hospices de Beaune.

Retrouvez mon article sur la vente des vins des hospices de Beaune 2019 ici !

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