Ces dimanche 8 et lundi 9 juillet avait lieu au Pavillon Ledoyen la première édition du « Salon des champagnes et des pâtisseries fines » organisé par Thomas Alléno et parrainé par son père Yannick Alléno. Cet événement faisait suite au « Salon des vins de la vallée du Rhône et de la truffe » qui s’est tenu en janvier dernier et qui se tiendra de nouveau les 13 et 14 janvier 2019.
35 maisons et vignerons de champagne étaient présents et représentaient tous les terroirs de la Champagne: Aspasie, Colin, De Sousa, Deutz, Drappier, Gosset, Leclerc Briant, Louis de Sacy, Mailly Grand Cru, Philippe Gonet, Pol Roger, Franck Bonville, etc.
La journée du dimanche était grand public et a vu se succéder aux fourneaux Yann Menguy (La Goutte d’Or Pâtisserie), Guillaume Sanchez, Kévin Lacote (KL Pâtisserie), Nina Métayer (Café Pouchkine) et Pierre Hermé (Pierre Hermé Paris).
La journée du lundi était réservée aux professionnels et ce sont Pablo Gicquel (Hôtel Le Crillon), James Berthier (Sucr é Cacao), Sébastien Vauxion (Kintéssence ** au K2 Palace), Aurélien Rivoire (Pavillon Ledoyen *** et Cheval Blanc Courchevel ***) et Grégoy Masse (L’Assiette Champenoise ***) qui nous ont régalés.
Pâtisserie
Chaque chef élaborait une recette pendant 1h en public pendant que des membres de sa brigade et des élèves de l’école Ferrandi préparaient derrière lui une centaine de bouchées dégustation offertes aux visiteurs.
Je me suis pour ma part rendu au salon le lundi après-midi, j’ai pu voir officier 3 chefs.
Sébastien Vauxion avait choisi de nous présenter un « Baba poivron rouge et citron, sirop au safran des Bauges« , un dessert surprenant, j’avais peur que le gout du poivron soit trop présent mais l’acidité du citron ainsi que les épices du sirop le contrebalançaient à la perfection.
Aurélien Rivoire quant à lui jouait à domicile et avait choisi de travailler un produit qu’il aime particulièrement: la fraise. Son dessert s’intitule « Petite ciflorette des vignerons, crème battue à la vanille, feuilletage pressé au sucre croustillant«
Une petite compotée de fraises, d’autres fraises cuites enveloppées dans des fleurs de courgette avec du moût de raisin, une délicieuse crème battue à la vanille ainsi qu’un petit feuilleté cuit à l’aide d’un appareil à panini !
Au fond de l’assiette, un disque élaboré à partir de fleurs de courgette écrasées, une explosion de couleurs du plus bel effet !
Quelques fleurs de sureau pour donner de la couleur et un léger goût floral, de litchi.
Pour terminer la journée de démonstration, Gregory Masse de l’Assiette Champenoise a réalisé un « Dessert chocolat craquant cerise » qui est régulièrement à la carte du restaurant.
Un dessert élaboré à partir de gavottes très fines (13min au four, on les décolle immédiatement et elles durcissent en quelques secondes) taillées de façon à pouvoir élargir la base puis refermer le dessert avec une ganache chocolat entre chaque couche et une sorte de coulis de cerise au milieu.
Des chefs très accessibles et pédagogiques et de beaux desserts ! Pour aller encore plus loin et lier les deux thèmes de ce salon, on aurait pu imaginer un accord mets-champagne pour chaque dessert. En servant une dose dégustation, les visiteurs auraient pu faire l’expérience d’un champagne et d’un mets qui se complètent, s’allongent, se fondent ou s’antagonisent !
Champagne
De belles maisons de champagnes étaient présentes au salon et j’ai fait de belles découvertes.
De Sousa
Une superbe gamme !
Grand Cru Réserve – Blanc de Blancs, dosé à 3g/l, base 2008 avec un dégorgement en novembre 2017. L’occasion de montrer le potentiel de vieillissement d’un brut sans année. Une belle complexité, l’équilibre acide idéal apporté par 2008, une pointe de salinité.
Mychorize – Un blanc de blanc base 2013 élaboré à partir de 3 parcelles d’Avize avec des vignes de plus de 50 ans conduites en biodynamie et labourées par un cheval. La vinification se fait un fût de chêne. Plus de matière que le vin précédent, c’est racé, avec de la minéralité, on ressent le sol, et on retrouve des épices délicates en fin de bouche.
Cuvée des Caudalies – extra-brut blanc de blancs Grand Cru, 50% de vin de 2013 et 50% de vin issu d’une réserve perpétuelle démarrée en 1995, vinification en fûts de chêne (dont 15% fûts neufs). Grande complexité, des notes boisées bien intégrées et plus de fraîcheur que le vin précédent.
Caudalies 2008 – les 2008 d’Avize sont décidément superbes, il y a tout, la trame acide associée à une grande complexité aromatique, des fruits jaunes, du miel, et surtout une grande pureté et une longueur infinie !
3A – Avize, Aÿ et Ambonnay. 50% chardonnay, 50% Pinot Noir. Il s’agit d’une base 2006 dégorgée il y a 3 ans. Des notes de torréfaction, une petite amertume en fin de bouche.
Gosset
Chez Gosset (plus ancienne maison de vins de champagne puisqu’elle existe depuis 1584 et qui a la particularité de ne pas posséder de vignes), on trouve des champagnes très bien faits, et une volonté ces dernières années de montrer les spécificités des cépages. La maison produisait depuis longtemps un blanc de blancs, ils ont lancé un blanc de noirs (100% pinot noir) il y a quelques années et pour conclure la trilogie, un blanc de meunier a été présenté il y a quelques mois.
J’ai dégusté le Grande Réserve, le Blanc de Blancs, le Rosé ainsi que le Petite Douceur Rosé mais c’est sur le Blanc de Meunier que je souhaiterais m’arrêter.
Pour ce champagne atypique, la maison Gosset a fait les choses en grand puisqu’elle a laissé vieillir cette cuvée 9 ans en cave. Des raisins issus de parcelles de Cumières, Pierry, Moussy, Vinay, Chavot, Monthelon, Hautvillers, etc. La vinification s’effectue sur des lies de chardonnay d’Avize et Cramant. Un dosage de 3g/l. Tirage limité à 5.000 bouteilles.
Une grande complexité aromatique, la rondeur du Pinot Meunier, on est sur la pomme mûre, la mirabelle, l’abricot avec une fraicheur et une salinité en fin de bouche. C’est un très beau champagne hommage à un cépage souvent mal-aimé alors qu’il est le plus planté..!
Philippe Gonet
Philippe Gonet, maison installée au Mesnil-sur-Oger et gérée par un frère et une soeur, Chantal et Pierre Gonet. 3 champagnes m’ont particulièrement marqué:
3210 – 3 ans de vieillissement, 2 terroirs (Mesnil-sur-Oger à 50% et Montgueux à 50%), 1 cépage (le chardonnay) et 0 dosage. C’est un vin minéral, très droit, sur l’agrume mais arrondit par les vins de Montgueux qui apportent les notes de pêche, d’abricot confit.
TER – Assemblage de 3 parcelles: »Les Hautes Mottes » du Mesnil-sur-Oger (Grand cru), “Vozémieux” d’Oger (Grand Cru) des vignes qui n’ont jamais reçu ni insecticide, ni pesticide et “Les Corrigniers” de Ludes (Premier Cru de la Montagne de Reims). Notez le très joli flacon dessiné en hommage à une bouteille du XVIIIème siècle retrouvée dans les caves de la maison. La vinification est effectuée en foudre de chêne de 60hl et les vins n’effectuent pas leur fermentation malo-lactique. Au nez, des notes toastées, de la noisette, puis en bouche, une grande vivacité, des notes de fleur blanche, une belle salinité et on ressent l’élégante rondeur du terroir d’Oger. Superbe !
2009 – 100% Mesnil-sur-Oger avec un dosage à 5g/l. Un vin typique du Mesnil-sur-Oger avec cette longueur infinie, l’élégance, la minéralité mais on sent également l’effet millésime avec la chaleur de 2009 qui apporte une rondeur, une richesse qui n’est pas caractéristique du terroir.
Leclerc-Briant
Une très belle dégustation de 2 rosés de macération:
Rubis de noir 2006 – 2j de macération, des notes de kirsch, de cerises compotées. Une belle charpente.
Rosé de saignée 1990 – le vin le plus surprenant dégusté pendant ce salon, un très beau cadeau de la maison puisque seulement 200 bouteilles de ce champagne ont été retrouvées dans les caves ! Raisins issus d’Hautvillers et Cumières, 4j de macération (le double de ce qui se fait à l’heure actuelle, d’où la couleur très foncée, qui rappelle presque un vieux vin rouge de Bourgogne ! La bouteille a été dégorgée fin 2017, le vin est donc resté 27 ans en contact avec les lies. Le vin n’est pas dosé. Au nez, de légères notes de champignon, de fruits confits. La bouche est très ample, sur la griotte, des notes de chocolat noir. Il y a encore beaucoup de tonus, en fin de bouche on retrouve des notes de tabac. On observe un peu de dépôt. Un vin unique, je ne suis pas prêt de déguster à nouveau quelque chose d’aussi atypique, un grand merci pour ce beau moment !
Mailly Grand Cru
Mailly Grand Cru est une coopérative qui regroupe 80 vignerons de 25 familles qui exploitent 70 hectares sur le village de Mailly classé Grand cru. Une vinification parcellaire permet de pouvoir jouer avec tous les lieux-dits de l’appellation et de réaliser les assemblages très finement.
J’ai dégusté le Brut réserve (75% Pinot Noir, 25% CHardonnay) qui est un beau brut sans année d’une grande fraicheur, l’Intemporelle 2011 (60% Pinot Noir, 40%) qui combine une fraicheur du fruit blanc et d’agrumes avec la puissance du pinot, l’Intemporelle Rosé 2010 dans laquelle 2 à 3% de Coteaux Champenois rouge de Mailly apportent une pointe de fruit rouge ou encore le Rosé de Mailly obtenu grâce à 90% de pinot noir en saignée et 10% de Chardonnay.
Nous avons conclu la découverte de la gamme par la dégustation comparée de deux millésimes de l’Exception Blanche. Cette cuvée est le fruit d’un partenariat puisqu’elle est composée de 50% de vins de Mailly et de 50% de vins issus de parcelles Grand Cru de la Côte des Blancs. Le millésime 2004 est vineux mais on sent que l’on est sur un chardonnay élégant et sur un millésime « classique ». Le millésime 2000 quant à lui présente des notes d’évolution au nez, un peu de champignon et offre une belle tension en bouche, avec des notes de pêche mure, de citron confit.
« Terroirs de Champagne »
Bauchet, Franck Bonville, Jean Michel, Lamiable et Pierre Trichet sont réunis sous une bannière collective « Terroirs de Champagne » et avaient organisé leurs champagnes par catégorie: brut sans année, millésimés, blanc de blancs, blancs de noirs, etc.
Je ne vais pas revenir sur Franck Bonville à qui j’avais consacré un article il y a quelques semaines. Sur ce stand, deux cuvées originales m’ont marqué:
Cep, champagne à l’état pur de Jean Michel
Un champagne sans souffre ajouté.
C’est un vin de plaisir très digeste
Cuvée 1333 de Pierre Trichet
Ce champagne 1er Cru issu du terroir « Trois-Puits » a la particularité d’être élaboré à 100% à partir de raisins d’un cépage méconnu: le Pinot Blanc. Avec l’Arbane, le Petit Meslier et le Pinot Gris, ils représentent 0,3% de la surface plantée et complètent le Chardonnay, le Pinot Noir et le Pinot Meunier dans la liste des 7 cépages autorisés en Champagne.
Certains vignerons l’utilisent dans leur assemblage mais il est intéressant de pouvoir déguster une cuvée 100% Pinot Blanc pour pouvoir sentir ce que ce cépage peut apporter à un assemblage.
Au nez, on sent la minéralité avec une touche de réglisse. En bouche, après les notes d’agrumes vient la mandarine puis une finale sur la coriandre. Un joli vin original !
Vignon Père et Fils
J’allais partir lorsque j’ai aperçu le stand de ce viticulteur installé à Verzenay et je suis heureux de m’être arrêté tant ce moment d’échange fût riche.
Stéphane Vignon exploite 5ha de vignes, pratique une viticulture raisonnée, récolte à maturité pour éviter au maximum la chaptalisation et effectue une vinification parcellaire (55 parcelles) à 65% en fûts de chêne issus des forêts de Verzenay. Il ne fait pas de collage ni de filtration lors de l’élevage et utilise des levures naturelles pour la seconde fermentation en bouteille.
Nous avons commencé la dégustation par un Rosé Grand Cru de Verzy « Les vignes Goisses » sur deux millésimes, 2012 et 2013. Cette cuvée est élaborée à partir de raisins issus d’une vieille vigne de pinot noir plantée en 1965. Ce sont des vins très frais, avec une pureté absolue du fruit, c’est croquant. 2012 est sur la fraise des bois là ou 2013 est sur la framboise. Stéphane Vignon sort alors des chocolats et nous dit de mâcher un carré avant de déguster à nouveau le champagne. Se produit alors un de ces rares moments de symbiose entre le mets et le champagne. L’acidité du champagne est renforcée et sa trame allongée, on pourrait presque croire que l’on vient de manger un chocolat aux fruits rouge alors qu’il s’agit d’un chocolat pur origine. C’est fantastique ! Stéphane nous confie avoir travaillé avec la Chocolaterie Thibaut à Epernay pour créer sur mesure des chocolats adaptés à chacun de ses champagnes.
Nous dégustons ensuite Blanc de blancs « Potence-Rochelles » extra-brut de Verzenay. Il est surprenant de produire un blanc de blancs sur un des plus beaux terroirs pour le Pinot Noir ! Ce vin est ambivalent, avec à la fois de la pureté et de la minéralité, des notes de pêche blanche, de groseille mais aussi de miel. C’est vif, iodé, j’ai beaucoup aimé !
Enfin, nous terminons avec la Réserve des marquises 2013, un assemblage des parcelles vieilles vignes (40 à 70 ans) sur Verzy et Verzenay. L’accord avec un chocolat au gingembre fonctionne à nouveau parfaitement bien !
—
Quel bel événement, bravo à Thomas Alléno pour l’organisation et merci aux vignerons et chefs pâtissiers qui sont venus transmettre leur passion !
[…] Le blog a déménagé ! Rendez-vous sur https://www.lastringent.fr.Retrouvez cet article à l’adresse : https://www.lastringent.fr/salon-des-champagnes-et-des-patisseries-fines/ […]